04/11/2008

Chères et chers camarades de la FFE,


Le Parti Socialiste français est aujourd’hui à un véritable tournant.

Vivant à l'étranger, vous percevez mieux que quiconque l'importance que revêt le socialisme dans le monde et la nécessité d'avoir un Parti enfin en capacité de proposer une alternative crédible et ambitieuse au libéralisme en faillite. Face à la crise actuelle qui consacre l'échec flagrant d’une mondialisation financière dérégulée, les idées socialistes n'ont en effet jamais été aussi pertinentes.

Si l'intervention publique coordonnée au plan international est nécessaire pour lutter contre l’écroulement du système bancaire et lutter contre la récession de l’économie réelle, nous affirmons aussi qu'elle doit être conditionnée à une révolution en profondeur du système financier international. Il faut revoir de fond en comble les règles prudentielles, limiter la possibilité de sortir les créances des bilans des banques par le procédé de titrisation, assujettir les fonds spéculatifs aux règles de solvabilité bancaires, créer de nouveaux mécanismes d'évaluation avec une agence publique européenne de notation, interdire les bonus non assujettis à l'impôt sur le revenu et surtout lutter contre les paradis fiscaux en refusant l'accès au territoire européen aux fonds ayant leur siège social dans de tels territoires.

C’est donc de système qu’il faut changer, en défendant une volonté radicale de transformation sociale. La mondialisation peut porter un progrès de civilisation. On ne peut pas, lorsque l'on est socialiste, renoncer à l'internationalisme, renoncer à équilibrer les pays riches et les pays pauvres, renoncer à la liberté de circulation. Le co-développement et l'immigration sont ainsi des sujets que nous devrons ré-aborder sincèrement. Notre économie doit beaucoup à ceux qui viennent d'ailleurs travailler dur chez nous. Socialistes, nous devons opposer à la politique sécuritaire, inefficace et immorale de Nicolas Sarkozy une vraie politique des migrations, au niveau national et européen, axée sur un principe de bon sens : pour réduire l'immigration illégale, il faut d'abord un bon système d'immigration légale. Nous sommes attachés aussi à l’idée d’une transformation de l’Organisation Mondiale du Commerce en une Organisation Mondiale du Développement, inscrivant les droits de l’homme, le droit du travail et le respect de l’environnement au plus haut des règles du commerce équitable et reconnaissant un degré de protection aux productions locales, progressif en fonction du degré de développement des pays concernés.

Depuis plusieurs années et singulièrement depuis 2007, les communautés françaises à l’étranger subissent le désengagement de l’Etat voulu par la droite. Nous devons le dénoncer et le combattre car il fragilise des centaines de milliers de familles. Justifier le recul patent du service public consulaire par le développement de la coopération consulaire européenne est une bien mauvaise plaisanterie lorsque l’on sait tous les progrès qu’il reste malheureusement à accomplir pour lui donner un réel contenu. Sous-traiter l’aide sociale à l’étranger au profit d’associations d’entraide à la gouvernance à tout le moins incertaine est inacceptable dans un État républicain. Enfin, fragiliser le financement et, partant de là, l’avenir même des écoles françaises en raison de la gratuité par niveau décidée sans concertation aucune par Nicolas Sarkozy est une rare injustice. Il faut clairement un État fort et actif à l’étranger. Il faut encourager et aider les communautés françaises, non les bercer par des propos démagogiques et les précariser dans les faits. C’est du renforcement du service public consulaire dont il s’agit, de l’accès à une assurance médicale minimale pour tous les Français de l’étranger et de la gratuité scolaire en fonction des revenus par un juste système de bourses.

Vous avez eu raison de mener le combat des députés des Français de l’étranger depuis de longues années. Ce n’est que justice que vous puissiez désormais élire vos propres parlementaires à l’Assemblée Nationale. Malgré le travail remarquable de vos Sénateurs, le dévouement formidable sur le terrain de vos élus Conseillers à l’Assemblée des Français de l’Étranger, une représentation parlementaire unijambiste empêchait la prise en compte efficace de vos intérêts par le Parlement. Ce progrès majeur devra être suivi par un autre, qui sera la transformation de l’Assemblée des Français de l’Etranger en un Conseil Général d’outre-frontière, doté de compétences et de moyens sur l’action sociale, les bâtiments scolaires et l’action culturelle de proximité. Nous entendons aussi que soit généralisé le vote à distance et par Internet à toutes les élections organisées à l’étranger, y compris aux élections européennes dont la suppression dans les centres de vote en 2003 avait été un mauvais coup du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin. En un mot, il est temps de donner aux Français de l’étranger, qui sont une chance pour notre pays, toute la place qui doit être la leur au sein des institutions de la République.

Chers camarades, nous sommes aujourd’hui exposés à une crise profonde. Crise économique, crise écologique, mais aussi crise des valeurs de solidarité et de progrès social. Dans le monde se lève pourtant un vent de révolte contre la fatalité, contre l’injustice, en un mot contre l’inacceptable. Il est porté admirablement par Barack Obama aux Etats-Unis, dont la victoire le 4 novembre sera un évènement d’envergure planétaire. L’espoir est en marche. Parce qu’en France, nous incarnons cet espoir, parce que nous sommes fiers d’être socialistes, porteurs d’un héritage centenaire de luttes pour le progrès partagé, nous ne devons pas rater le Congrès de Reims. Les Français nous attendent. Ce Congrès doit être utile pour eux. Ne les décevons pas. Ne les désespérons pas. Ne laissons pas d’autres, loin du Parti Socialiste, incarner l’opposition à Nicolas Sarkozy.

La motion E permet de se doter d’un Parti renouvelé et rénové, de clarifier notre ligne politique et ainsi de rassembler les socialistes, puis les Français. L’alternance est à ce prix, à l’étranger aussi où l’action des équipes successives de la FFE a conduit la gauche à des résultats si prometteurs en 2007. Nous avons beaucoup à construire ensemble. Il est grand temps. Faisons du Congrès de Reims le début de la reconquête.

Amitiés socialistes,



Ségolène Royal Gérard Collomb Gaëtan Gorce Frédéric Léveillé

Lettre aux militants

Chers toutes et tous,


On voudrait nous faire croire que le vote que nous allons faire jeudi est anodin, comme si les élections américaines devaient absorber tous les regards.
Mais non ! Ce vote est très important, historique même, et vous avez une responsabilité essentielle. N’oublions jamais que dans de nombreux pays des hommes et des femmes risquent leur vie pour créer des partis libres. Nous qui avons la chance de pouvoir agir, faisons-le, et je vous appelle à participer très nombreux à ce vote.

Car même si les Français ne comprennent pas toujours nos procédures, ce vote du Congrès va dire ce que l’avenir de la gauche sera.


Oui ou non, voulons-nous écrire une nouvelle page de notre histoire, vibrante et populaire ?

Oui ou non, notre parti va-t-il enfin bouger ?

Oui ou non, la nouvelle génération que nous poussons en avant va-t-elle pouvoir prendre ses responsabilités ?

Oui ou non, le peuple que j’ai vu tellement présent et attentif au cours de ces derniers mois, va-t-il venir vers nous parce que nous saurons lui redonner de l'espoir ?


L'histoire nous enseigne que les civilisations sont mortelles. Pourquoi en serait-il autrement pour un parti ? Comme l'ont dit les femmes salariées de la Camif, les ouvriers de Ford et bien d’autres : « Le PS peut disparaître s'il s'éloigne du peuple. »

Même si ces mots nous secouent, il faut les entendre. Alors secouons-nous. Ne retournons pas à la case départ. Choisissons l’avenir. Donnons-nous un temps d’avance.

Nous n’avons pas le droit d’être faibles ou de disparaître au moment où la France a besoin de nous. N’oublions jamais la confiance que dix-sept millions de Français ont placée en nous, et pensons aussi à toutes celles et ceux cruellement déçus par une droite dont l’insolence le dispute à l’incompétence.

Aujourd’hui l’Amérique métissée assume son histoire. Et nous? Pourquoi renoncer à tendre la main à la France métissée qui a tant cru en nous et ne demande qu’à revenir vers nous ? N’y renonçons pas. Nous le ferons.


Imaginons que les Français, grâce à nous, se ré-intéressent à la politique.

Imaginons qu’on leur donne, nous socialistes, les clefs pour comprendre le monde et donc peser sur les choix de société.

Imaginons que nous apportions au mouvement social notre énergie pour inverser les rapports de force entre le capital et le travail.

Imaginons un parti dans lequel le coût de l’adhésion, désormais très modique, permettrait à la jeunesse, aux employés, aux ouvriers, aux petits retraités, de venir nous rejoindre.


Il faut oser un parti tellement uni et où les militants sont tellement respectés que lorsqu’ils désignent un ou une candidate, tous les autres font campagne pour la victoire. C’est possible, comme viennent de le montrer les forces qui se sont rangées autour de Barack Obama.

Il faut oser tout transformer pour mieux atteindre notre objectif. Quel est cet objectif ? Humaniser le monde. Agir pour que les valeurs humaines s’imposent toujours sur le cynisme financier. Un bout de changement ne suffira pas. Les tumultes actuels le prouvent.


Deux millions d’Italiens se sont levés contre Silvio Berlusconi et sa politique de destruction de l’éducation publique et laïque.

Je vous assure que nous sommes capables d’en faire autant. A condition de le vouloir.


Jeudi 6 novembre, vous pouvez le faire : votez pour une transformation radicale, sereine et utile.

Cette transformation que la droite redoute. Mais une transformation que les Français, notamment ceux qui souffrent, attendent de nous, parfois désespérément.

Oui, nous le voulons ! Oui, nous le pouvons ! En avant !

Fidèlement,

Amitiés socialistes,


Ségolène

5 questions pour un congrès: les réponses de Jean-Louis Bianco

1. Que vous inspire la crise financière actuelle ?



Ce qui se passe montre où conduit la spéculation financière, la recherche effrénée du profit à court terme et l'absence de toute régulation sérieuse.

Les racines du mal sont profondes et durables. La finance de marché a contourné les normes Bâle II (qui imposent aux banques de détenir un dollar de capital environ pour 12 dollars de crédit) et permis à ses acteurs d'accorder 32 dollars de crédit pour un dollar de capital. Par le biais de la titrisation, les banques ont pu revendre leurs créances et prêter toujours plus, au mépris de toute prudence élémentaire, en refusant de voir que le taux d'endettement des ménages américains atteignait des niveaux insoutenables. Quant aux grands fonds spéculatifs, ils n'ont jamais été assujettis à la moindre règle et ce, d'autant moins qu'ils ont souvent leur siège dans des paradis fiscaux.

Cette crise est une preuve de l'échec de la régulation de la finance par elle même. Un monde où les transactions réelles, celles qui concernent les biens et services, ne représentent que 2,7% des transactions monétaires de la planète est un monde de fou.

Aujourd'hui, nous devons donc avoir le courage politique de changer un système financier perverti. Comme l'a rappelé à de nombreuses reprises Ségolène Royal, rien ne serait pire que de simplement colmater les brèches et consolider ce système.

À travers la motion E, nous affirmons qu'un autre monde est possible, un ordre financier, économique, écologique et social juste et efficace. La mondialisation n'est pas forcément porteuse de toujours plus de malheurs, elle peut et doit provoquer un progrès de civilisation. C'est la volonté politique qui arbitrera cette alternative car les propositions existent, notamment au niveau européen. Un certain nombre sont présentes dans notre texte.



2. Quel rôle pour le futur premier secrétaire ?



Le ou la futur(e) Premier(e) secrétaire devra faire des propositions fortes, précises, crédibles sur un nouvel ordre mondial et répondant aux problèmes quotidiens des Français. Il s'agira de porter une opposition très claire face au pouvoir actuel qui défait l'impartialité de l'État sur tous les terrains. En parallèle, il ou elle devra faire de notre formation politique un parti de masse, profondément renouvelé, ouvert et en phase avec la société.



3. Quel fonctionnement pour le PS demain?



La force du PS tient à sa capacité à s'ouvrir en permanence sur l'extérieur. Il nous faut donc de nouvelles formes de militantisme, et des conventions thématiques dans chaque région ou département. Notre formation devra être plus à l'écoute des territoires, des militants, des élus locaux. Les élections locales ont prouvé que les Français faisaient majoritairement confiance aux élus socialistes. Nous devons donc donner plus de poids aux intelligences territoriales mais également reprendre notre place sur le terrain, dans les mouvements sociaux, et travailler largement avec les milieux universitaires, économiques, associatifs, syndicaux et avec l'ensemble des citoyens. Enfin, le Parti devra être en capacité de rassembler sur des bases claires et être audible. Cela passe par une opposition conforme aux valeurs fondamentales des socialistes, avec un projet crédible et ambitieux, et avec des réponses concrètes données aux Français. Il faut défendre une volonté radicale de transformation sociale.



4. Quelles relations envisager avec le MoDem ?



Notre motion est parfaitement claire, d'abord un parti de masse, et la stratégie d'Épinay. Elle consiste d'abord à rassembler la gauche, toute la gauche. Nous n'avons donc pas de divergence avec les autres motions sur ce point. Mais arrêtons l'hypocrisie : dans toutes les motions, il y a des élus qui ont fait alliance avec le MoDem. Nous savons tous que le PS ne peut pas toujours l'emporter seul. Ainsi, nous voulons être cohérents entre nos idées et nos actes. Après avoir rassemblé la gauche, nous devrons discuter avec l'extrême gauche qui devra alors se positionner clairement sur ses motivations. De la même manière, nous devrons discuter avec tous les démocrates (dont les candidats du MoDem) sur la base de notre projet et autour de nos propositions.



5. Citez trois propositions concrètes de votre motion.



La crise que nous connaissons est multiple, nos réponses doivent donc répondre à plusieurs problématiques liées entre elles.

Pour être très concret, je pense important d'évoquer le problème du rapport entre le travail et le capital. La crise du travail en France est bien présente. Par rapport aux autres pays européens, les salariés français sont moins satisfaits de leur situation. Sur ce point, nous proposons de réformer la composition des conseils d'administration des entreprises avec une représentation des salariés à hauteur de 30%.

L'actualité illustre aussi la nécessité pour notre économie de permettre la création d'emplois durables, la soutenabilité de nos comptes publics, la préservation de notre modèle social et la compétitivité de nos entreprises. Proposition très concrète là encore, la conditionnalité des aides qui doivent être subordonnées à la prise de risque, à la création d'emplois non précaires, à la non délocalisation.

Enfin, pour faire d'urgence l'excellence environnementale, nous souhaitons créer un fonds "après pétrole"

(notamment en taxant l'industrie pétrolière) avec deux objectifs : subventionner les installations en énergie renouvelable et financer les transports alternatifs propres.



Ces trois propositions ne sont présentes que dans notre texte.